Ou pour être plus précis, j’ai refait de l’argentique. Oui, quand on a passé allègrement la quarantaine, on a connu l’argentique dans sa jeunesse, qui n’est pas si lointaine. Mais entre l’autorisation parentale des années 80 me permettant d’appuyer une ou deux fois sur le déclencheur mais pas plus parce que tu comprends le développement ça coûte cher, et celle que je m’octroie maintenant en tant qu’adulte consentant, il y a tout un monde.

Tout d’abord le matériel. Mes parents étaient équipés d’un splendide Agfamatic 100 sensor, un petit appareil 126 qui faisait le job, c’est à dire prendre des photos souvenirs pendant nos vacances, comme la plupart des français qui possédaient un appareil photo à cette époque. Aujourd’hui, j’ai à ma disposition une vingtaine d’appareils argentiques des années 50 aux années 90, du compact au réflex 35mm, en passant par le folding, le 6×6 et des Polaroïds. Certains ne sont pas fonctionnels, et d’autres nécessitent des pellicules qui ne sont plus produites. Il m’en reste quand même une dizaine que je peux charger avec du film, et utiliser lors de mes balades photographiques. Leur utilisation est, pour le moment, très limité du fait que mes sorties photos le sont également. Pas toujours simple de cumuler emploi, vie de famille, musique, photographie et confinement.
Effet de mode ou envie réelle
Il suffit de faire une recherche sur les sites de ventes d’occasion, (leboncoin & ebay pour ne citer qu’eux), pour se rendre compte que le prix des appareils photos argentiques explose depuis quelques années. Ca en devient indécent. A croire qu’il existe vraiment un effet de mode avec la photographie argentique. Les annonces, parfois à la limite de l’arnaque, pullulent. Des appareils dont l’annonce précise : ne fonctionne pas, fonctionne mais telle pièce est cassée, ne sait pas s’il fonctionne, pour déco, sont vendus quasiment au même tarif que leurs homologues pleinement fonctionnels.

Pour ma part, au-delà de mes souvenirs d’enfance, il s’agit de renouer avec la magie de ces vieux appareils qui prennent (ou prenaient) la poussière dans un grenier ou sur une étagère. Je ne souhaite pas m’arrêter uniquement au fait de mettre une pellicule et de sortir cramer les 36 poses. J’apprends aussi à développer moi-même les pellicules, en espérant dans un futur proche, disposer de suffisamment d’espace pour réaliser mes tirages.
Rappel
Avant d’aller plus loin, un petit rappel pour les débutants, car ils ont tendance à confondre : développer une pellicule, c’est transformer en négatif, une pellicule qui a été exposée. Réaliser un tirage, c’est mettre sur papier la photo à partir du négatif. Par abus de langage, la plupart du temps, les gens pensent que « j’ai fait développé mes photos » signifie « j’ai fait développé mes négatifs et fait tiré mes photos sur papier ». Je vous l’accorde c’est plus court à dire.
De la prise de vue au développement
Cela fait maintenant près de 2 ans que je fais de la photographie argentique et un peu moins de 6 mois que je développe mes pellicules. J’ai investi dans un kit de développement , un manchon de chargement, et dans les produits chimiques nécessaires au développement (Révelateur, bain d’arrêt, fixateur). En rajoutant les bouteilles-accordéons et divers accessoires, cela m’a coûté environ 150€. Vous trouverez probablement moins cher sur un site de vente d’occasion, si vous en avez la patience. Pour le développement chez un photographe, comptez entre 6 et 8€ la pellicule. Après un calcul rapide, je rentrerai dans mes frais après environ 20 pellicules (j’en suis à 5, et 4 en attente).

Si vous vous souhaitez une estimation plus précise du prix de revient d’un développement maison, vous pouvez aller faire un tour sur https://www.la-photo-argentique.com/developpement-noir-et-blanc-maison-cout-de-revient/
Je ne vais pas vous détailler dans cet article de quelle manière développer vos photos. Si vous êtes tombés sur cet article en recherchant une méthode, il y a suffisamment de site qui l’expliquent bien mieux que moi : Ici, là et là aussi (mais pas là).
Orgueil et préjugés
Par contre, je peux dors et déjà lister ici quelques trucs qui m’ont servi les premières fois :
Le tout premier conseil que je peux donner, c’est de sacrifier une pellicule neuve (la moins chère, une périmée même, on s’en fou) et de la dérouler en plein jour. Elle sera bien évidemment inutilisable ensuite. Conservez-la précieusement. Cette pellicule va vous permettre de vous entraîner à la charger dans la spire plusieurs fois, d’abord à « l’air libre » puis dans le manchon de chargement jusqu’à ce que cela devienne une habitude pour vous. Cette méthode vous évitera de sacrifier sur l’autel de la déception, une pellicule 36 poses qui vous aurez peiné à remplir. L’idée derrière ça étant d’éviter d’abimer le film en le touchant partout avec vos gros doigts boudinés, le tordre, voire même l’arracher d’énervement au bout d’une heure de tentative désespérée de chargement. Marrez-vous, je vous promets qu’il n’y a rien de plus énervant.
Quoique… Pensez à vérifier que tout le matériel nécessaire est dans votre manchon de chargement avant de décapsuler la pellicule pour la mettre dans la spire. Vous savez la spire que vous étiez pourtant persuadé d’avoir mis dans le sac. Ah non elle est restée sur le lavabo. deuxième pellicule HS.

Admettons que le chargement de la pellicule se soit passé sans encombres, il est temps de passer au développement proprement dit. Une chose simple à retenir avec les produits chimiques : le Révélateur Révèle, le Fixateur Fixe. Facile non? Respecte bien l’ordre alors, parce que fixer avant de révéler, reviens a effacer toutes les informations présentes sur la pellicule. En gros c’est comme si tu formates la carte mémoire de ton appareil photo numérique avant de récupérer les photos sur ton pc. Imagine, tu ouvres la cuves, tu sors la spire et la pellicule est transparente, vierge de photos. Bah ca te fera une troisième pellicule pour t’entraîner.
Maintenant que tu as deux pellicules (ou 3 pellicules) pour t’entraîner, habitue toi à charger chaque nouvel appareil photo argentique qui passe entre tes mains, et vérifie dos ouvert que l’entraînement de la pellicule n’est pas défaillant (ou plutôt que tu l’as bien installée). Ca t’évitera d’avoir une autre pellicule vierge à la fin de ton développement, même si tu as bien Révélé/Fixé dans l’ordre.
Conclusion
Au delà de ses aspects techniques et du développement, l’argentique me permet de me concentrer sur la prise de vue et d’avoir une réelle réflexion sur ce que je veux obtenir comme image. 36 poses, c’est à la fois peu, et beaucoup lorsqu’il faut que tu termines la pellicule avant de pouvoir la développer. C’est également un réel plaisir d’utiliser ces boitiers qui fonctionnent sans batterie (voire sans piles) et qui sont pour certains quasiment indestructibles ou presque.
J’éprouve encore des difficultés pour obtenir le rendu que je souhaite au développement, notamment en matière de contraste et de grain, mais je ne désespère pas arriver à un résultat probant dans les prochains mois.
Vous pouvez retrouvez quelques photos développées par mes soins puis scannées, dans la section argentique de mon site.

Reims – Adepte de la photo floue et du doigt devant l’objectif. Je fais parfois des photos potables, en fonction de la météo et du sens du vent.